Mali : Législatives 2020 otages des terroristes et du COVID-19

Le dimanche prochain, les maliens se rendront aux urnes. Tous ceux qui se rendront dans leurs centres de vote pour accomplir leur devoir citoyen, iront avec la peur au ventre : la peur de contracter le coronavirus en faisant le déplacement.

Dans les régions dites du « sud », et particulièrement dans le District de Bamako, il n’est pas sûr qu’avec la campagne contre le coronavirus, on puisse avoir une grande affluence dans la mesure où habituellement le bamakois moyen n’a jamais été emballé par les élections.

En plus de la peur du COVID-19, une autre vient s’ajouter pour la plupart des électeurs des trois-quarts du territoire national, c’est-à-dire les maliens des régions de l’est, du septentrion, et du centre du pays.

Là, des terroristes frappent où ils veulent, quand ils le veulent sans être inquiétés outre mesure, malgré les promesses de sécuriser les élections faites par les diverses forces de défense et de sécurité présentes sur le territoire national.

A preuve, le récent drame survenu à Ogossagou, et, depuis le début de ce mois de mars 2020, combien d’actes terroristes ont été enregistrés ?

Du 1er au 05 mars dans le seul cercle de Bankass on a incendié et détruit plus de 11 villages et tué plus de 35 personnes dont des enfants, de milliers de déplacés cherchent refuge dans des gros villages ou des villes.

Chaque jour qui passe est un jour de deuil singulièrement dans les cercles de Koro et Bankass. La violence n’épargne pas les candidats à la députation.

A Koro, Nara, Niafunké des candidats à la députation ont été délestés de leurs véhicules et de leurs moyens de campagne.

Plus au nord, le gouvernorat de Taoudénit a été attaqué : véhicules et armes ont été emportés.

Il y a moins d’une semaine, le jeudi 19 mars attaque contre les FAMAs à Tarkint : bilan 30 morts du côté de l’armée malienne ; véhicules et matériels emportés ou calcinés.

Sans compter les victimes des EEI (Engins Explosifs Improvisés) qui explosent et tuent par ci par là, les populations déplacées qui pensent plutôt à leur survie qu’à retirer une carte d’électeur dans un centre d’élection, s’il se trouve qu’il n’a pas été rayé de la carte.

Ailleurs où les jihadistes règnent en maîtres, dans la zone du delta, leurs « anges gardiens » ne permettent même pas qu’on parle d’élections !

Dans cette atmosphère d’apocalypse, peut-on parler d’élections ?

Prises en otage par les terroristes sur une bonne partie du territoire national et dans une moindre mesure par le COVID-19 sur tout le territoire national, il va de soi que de telles élections ne seront en réalité que des élections de façade, des élections viciées, prises en otage, en tout cas dans ces régions doublement menacées.

Même aux premières années de la démocratie où les élections étaient à peu près correctes, le taux d’une consultation électorale, qu’elle soit de proximité, législative, présidentielle ou référendaire, n’a pas atteint les 50% des inscrits.

Le meilleur taux de participation pour toutes élections confondues depuis 1992, a été celui réalisé à la présidentielle de 2013 avec 48,98 % !

C’est dire qu’il ne faudrait pas prendre en compte dans les critères « d’élections normales » le taux de participation, en tout cas pour ces législatives 2020. Nonobstant ces déficiences, nous ne sommes pas de ceux-là qui pensent qu’il faut reporter ces élections.

En effet, comme le dit si bien une sagesse de chez nous : « Si on a des plaies un peu partout sur le corps, on procède à un traitement généralisé et il n’est pas toujours dit que toutes les plaies se cicatrisent en même temps. Mais, ce n’est pas pour autant, qu’on remettra à plus tard le traitement à fortiori on le laissera tomber »

Hamidou Ongoïba

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