Chef d’une milice locale d’autodéfense, constituée de chasseurs traditionnels, Sinaly a été assassiné dans la nuit du 6 au 7 novembre 2022 à Diombougou, son village natal, à une quinzaine de kilomètres de la ville de Djenné.
De mémoire des autochtones de Diombougou, l’on a rarement connu un chasseur aussi intrépide prêt à se sacrifier pour sa patrie. Issu d’une famille de marabouts, Sinaly dirigeait la prière à la mosquée. Il a embrassé la chasse depuis sa plus tendre jeunesse. Comme c’est le cas pour la plupart des jeunes de la contrée, Sinaly passait le plus clair de son temps dans la brousse. Fusil contre l’épaule, il guettait des gibiers et autres animaux féroces qui troublaient la quiétude des habitants.
Depuis plusieurs années, cette passion connait une tournure avec l’arrivée des groupes armées dans la zone. Face aux attaques terroristes récurrentes qui ciblent les paisibles villageois, il forme ainsi avec ses confrères donson (chasseurs traditionnels) un groupe d’autodéfense locale. Reconnu pour son aisance à la parole et ses relations avec l’Administration, celui qui n’a jamais connu le chemin de l’école est tout de suite choisi par ses pairs pour diriger la milice.
Bataille de Marébougou
Marié à deux femmes et père de 5 enfants, Sinaly Maïga est sexagénaire. Le modeste paysan alterne agriculture, élevage de bovin et pêche. Des habitants de la région témoignent que grâce à sa maîtrise d’un terrain qui l’a vu naître, il était un guide et un interlocuteur privilégié pour les forces armées maliennes lors des opérations.
Il y a quelques mois de cela, à la veille de l’hivernage, ne voulant pas que sa présence soit un obstacle pour un cessez-le-feu conclu entre son village et des groupes armés, le célèbre chasseur avait quitté Diombougou. Il n’était pas des partisans de l’option du dialogue avec « l’ennemi ». Une année auparavant, il avait perdu beaucoup des hommes lors d’une bataille avec des groupes armés à Marébougou.
Situé à quelques dizaines de kilomètres de Diombougou, le village de Marébougou a été le théâtre d’une bataille féroce. A l’issue des combats opposant les hommes de Sinaly venus pour libérer Marébougou aux envahisseurs, cinq de ses « généraux » ont rendu l’âme.
Assassinat
Un affront que le chef des donson avait du mal à digérer. Le temps de se préparer pour des nouvelles batailles, il s’éloigne de sa famille pendant plusieurs mois. Revenu vers la siens en ce début de la saison des récoltes, Sinaly se repose à un endroit retiré.
Des sources locales rapportent que des individus non identifiés auraient traversé le fleuve séparant Diombougou et la ville de Djenné à bord d’une pirogue nuitamment avant d’arriver chez lui. Après avoir assassiné le donson qui dormait seul dans une chambre, ils auraient enfoncé le clou d’une autre pièce. Les bourreaux du chasseur emportent sa moto et une autre appartenant à son fils ainsi que ses deux téléphones avant de disparaître dans la nature.
M. D