A Bamako, la face cachée du camp des déplacés de Faladiè

Source image: Bamada.net

Les cercles de Koro et de Bankass se vident depuis des mois de leurs populations, fuyant les conflits intercommunautaires qui labourent les régions du centre du Mali depuis quelques années. Certaines ont pu trouver refuge dans la région de Sikasso, d’autres à Bamako disséminés sur deux camps : Niamana et Faladiè. Ces déplacés vivent un véritable calvaire entre le traumatisme lié à l’abandon de leurs terres, l’insalubrité des camps et le manque de moyens. Le blogueur AliouDiallokè nous transporte au camp des déplacés de Faladiè, à Bamako, sur la rive droite du fleuve Niger, quelques semaines après celui de Niamana.

Jeudi 14 Février. Il est 11h00. De part et d’autre, une procession de femmes et d’enfants qui n’ont d’yeux que pour un camion rempli de vivres. Un don envoyé par un particulier qui a appris l’existence du camp via les réseaux sociaux.

Les enfants, les plus nombreux, torse et pieds nus, le regard hagard. Les femmes habillées en haillons, les yeux rivés dans le vide. Parmi elles, beaucoup sont enceintes en état avancé, et ont dû faire le trajet Koro-Bamako dans des conditions extrêmement difficiles. « L’équation était simple : soit on part, soit on meurt. Je n’ai plus de nouvelles de mon mari et de mon premier enfant, je ne sais s’ils sont vivants ou pas. Je suis venu avec mes trois enfants », raconte Fanta, l’une des dernières venues.

Risques de santé

Ils sont plusieurs centaines, ces déplacés qui occupent les deux camps qui ne ressemblent, à première vue, qu’à un dépotoir d’ordures. Pourtant, c’est bien un camp de réfugiés comme nous le confie Hamma Diallo qui fait office de porte-parole du camp : « Nous avons aujourd’hui plus de 300 personnes dans ce camp et les gens continuent de venir, donc on ne peut pas donner un nombre exact. »

Ici, la fumée qui s’échappe des ordures s’invite directement dans les abris faits de plastiques, vieux sacs et tissus récupérés sur les tas d’ordures. N’ayant pas d’autres solutions, c’est sur les tas d’ordures également qu’ils font leurs besoins naturels. Le manque d’eau dans le camp accroît également les risques sanitaires. L’accès à une toilette privée tenue par un particulier coûte entre 25 et 50 francs, selon le besoin.

Ainsi, ces personnes qui ont tout perdu n’ont pas le moyen de s’offrir le luxe d’aller aux toilettes. Résultat : hommes, femmes et enfants, tous, se soulagent à l’air libre. Des grincements de dents se font entendre parmi les personnes travaillant dans la zone, à cause de cette situation. « La nuit tombée, tu les verras sur les tas d’ordures déféquer. Allez constater derrière », raconte Moussa, travaillant dans le marché à bétail, contigu au camps des déplacés.

Une longue attente

« Beaucoup de personnes viennent nous voir, d’autres écrivent ce que nous disons, et d’autres nous filment. Ils disent tous vouloir nous aider. Mais, on ne voit rien après Plusieurs personnes sont passées ici et tous ont promis de l’aide, certaines sont venues mais nous attendons encore les autres », précise Boureyma, un autre porte-parole des déplacés.

Plusieurs organisations humanitaires nationales, des particuliers, des citoyens maliens ou d’ailleurs, alertés par les publications sur les réseaux sociaux, ont décidé de venir en aide aux déplacés.  Déjà, un secrétariat est mis en place par ces associations pour coordonner la réception des différents dons. La direction du développement social a aidé à installer de nouveaux abris, et plusieurs personnalités publiques ont promis de mettre la main à la poche.

Parmi elles, Fatoumata Diallo, qui a décidé d’aider les enfants : « Les mots manquent pour exprimer ma douleur. Au début, ils n’étaient pas nombreux. C’était facile de les aider. Mais plus le nombre augmente, plus on a des difficultés. Heureusement que beaucoup de personnes sont là maintenant pour les aider et ça me soulage. Les Maliens sont humanistes ».

La mobilisation est palpable sur les réseaux sociaux et sur le terrain, même si beaucoup reste à faire pour ces déplacés qui doivent aussi vivre dans la dignité. Nos autorités doivent penser à aider ces déplacés de sorte qu’ils soient indépendants, en attendant le retour au calme dans le Centre.

Aliou DIALLOKEI Benbere

 

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